Autre article sur les Federici dans la sezzione PP.
Le Sporting Club de Bastia dans la ligne de mire
La ville de Bastiaest l'une des zones d'influence privilégiées des " bergers " de Venzolasca. Le fief, en Haute-Corse, de ce clan redouté sur l'ensemble de l'île. Son chef, -Ange-Toussaint Federici, dit " ATF ", s'en félicite, en septembre 2016, lors d'une visite au parloir de son ami Jean-Michel Fondacci à la prison d'Alençon - Condé-sur-Sarthe (Orne), où il est incarcéré. " A Bastia, tout est en règle ", lui dit-il. Le club de football local, le Sporting Club de Bastia (SCB), n'échappe pas à son appétit. Les policiers soupçonnent en effet les Federici d'avoir voulu faire main basse sur cette institution insulaire.
Dès le 7 novembre 2015, alors que le SCB connaît des difficultés financières – l'été précédent, il a frôlé la relégation en Ligue 2 –, " ATF " explique à son fils Pierre que c'est lui " le patron " du Sporting. Il donne -ensuite la ligne à suivre auprès des dirigeants en place : transmettre ses ordres (répéter " Papa a dit comme ça "), investir sans exagération (" Tu mets la moitié de ce qu'ils t'ont dit ") et récupérer une partie de la mise (" Tu demandes 15 000 euros par mois "). Le sujet, -visiblement, lui tient à cœur.
En décembre de la même année, " ATF " informe de nouveau l'un de ses cousins qu'il veut prendre le -contrôle total du SCB. Mais les discussions traînent et ne sont pas si simples. En mars 2017, écrivent les policiers dans un rapport dont Le Monde a eu connaissance, il s'entretient avec un autre cousin, Paul Bastiani.Selon les enquêteurs, " ATF " se montre alors très ferme et -mécontent lorsqu'il apprend que " beaucoup de monde " va discuter avec Pierre-Marie Geronimi, le -président du SCB. " Le seul que j'ai autorisé, c'est Pilou - Pierre-Louis Montet, son homme de -confiance - ", dit-il agacé.
Dépôt de bilan et rétrogradation
La situation financière du club se dégrade. La menace d'une descente en Ligue 2, voire en National (la troisième division), se dessine. Au printemps 2017, M. Montet s'active pour chercher des financements. Il est, lui-même, en tant que dirigeant de la société de sécurité Sisis, chargée de la sécurité du Sporting, in-téressépar l'avenir du club. Parmi les candidats au rachat figure Qwant, -le moteur de -recherche sur Internet français, qui était déjà un sponsor du SCB pour la -saison 2016-2017. -Selon les enquêteurs, son dirigeant, Eric Léandri, qui n'a pas donné suite aux solli-citations du Monde, assure alors qu'il est d'accord pour prendre des parts sans revendiquer une place au sein de l'état-major du club, ce qui semble convenir aux Federici.
Pierre-Marie Geronimi ne semble pas associé à ces discussions. L'été dernier, une dizaine d'entrepreneurs, dont M. Léandri et M. Montet, tombent d'accord pour tenter de sauver le club. La police judiciaire souligne que ces éléments " calquent quasi parfaitement les propos tenus par Ange-Toussaint Federici à son cousin Paul Bastiani ". Finalement, ce projet échouera.
Si le Sporting avait été maintenu en Ligue 2 par les instances du football français, le montage était viable. Mais le club, contraint de déposer le bilan, est rétrogradé d'office en National 3 (championnat amateur), perdant ainsi son statut professionnel, ses droits télévisuels et des subventions conséquentes. D'un coup, l'intérêt des Federici -décroît. La veille du dépôt de bilan, M. Montet a tout de même obtenu du président Geronimi qu'il lui verse les 130 000 euros dus par le club à la société Sisis. Une chance que n'auront pas la plupart des créanciers… Sollicité, M. Geronimi n'a pas donné suite aux sollicitations du Monde. M. Montet se -défend pour sa part d'avoir " joué un grand rôle " et assure qu'en aucun cas " il n'agissait pour le compte de la famille Federici ". Il -dément tout lien d'affaires avec eux et rappelle qu'il a été placé sous le statut de témoin assisté – et non de mis en examen – par les magistrats chargés de l'enquête. Selon lui, " tout cela relève d'une construction policière bâtie sur quelques bribes de phrases bien choisies ". A l'entendre, " l'influence de “Toussaint” ", depuis sa prison, est " nulle ".
J. Fo. et S. Pi.